Il y a un pas énorme à franchir entre le désir et le vivre. Réaliser un fantasme n’est jamais anodin et cela demande la réunion de plusieurs paramètres. D’abord la relation de couple qui permet d’oser partager son envie. Puis la complicité de partager cette envie et enfin la confiance et l’amour qui poussent à envisager la réalisation cette envie.
Nous avons vécu cette évolution rapidement mais en respectant tout de même notre rythme. J’avais de mon côté l’esprit déjà libertin avant notre rencontre et n’ayant jamais caché ce trait de personnalité ainsi que mes modestes expériences passées à ma femme (même en devenir), elle a pu appréhender l’idée, l’embrasser, et laisser vagabonder son esprit coquin en se disant : “si on continue de s’aimer ainsi : il se peut que cela marche et alors ce serait fort”.
Par rapport à beaucoup de couples qui vivent la confrontation du fantasme libertin, j’avais tout de même deux atout précieux et qui lorsqu’ils font défaut peuvent tuer dans l’œuf toute velléité d’ouverture : d’abord, l’invitation d’une autre femme dans notre intimité ne m’intéressait pas ou trop peu, ce qui évitait d’emblée l’idée de compétition. Ensuite n’étant pas attiré spécifiquement par le saphisme, cela évitait toute tentative d’influence ou d’incitation déplacée et trop intrusive vis à vis de ma femme et de sa sexualité.
Nous envisagions donc d’inviter un homme pour une rencontre candauliste, le but était de s’ouvrir, de s’offrir à l’inconnu tout en restant dans un échange dual. La grande interrogation qui se posait à nous deux d’ailleurs était assez évidente “et si ça nous plait pas ?”.
Nous avons donc pris le temps, d’abord de se sentir assez prêts, mais également de choisir la personne qui comprendrait notre situation, nos hésitations. Des sites spécialisés dans ce type de rencontres permettent aisément de trouver à qui parler. Mais ça peut être chronophage.
Ma chère et tendre me délégant non sans une très grande confiance, ce fastidieux travail de recherche, je finis par inviter un jeune homme à nous rencontrer.
La pression monte, nous avons un nom, une date.
Il y a des barrières qui ne sont pas faciles à faire tomber. L’une d’entre elle est le regard de l’autre et le sien propre. Dépasser le tabou, dépasser une éducation, une morale se dépasser soi-même.
L’idée nous vint alors naturellement d’utiliser un bandeau, attaché sur ses yeux. Les échanges de regard évités, on pouvait aisément, ainsi que l’autruche une fois la tête plantée dans le sable, relever le derrière et offrir ses fesses au prédateur.
Ce ne fut pas notre meilleur souvenir, loin de là. Mais c’était notre premier souvenir dans le libertinage.
Nous étions stressés, légèrement enivrés presque poussés par la nécessité d’en finir pour enfin passer de l’autre côté. Ce rite initiatique fut vécu comme un pansement que l’on enlève et franchement, tout de suite après, nous étions presque déçus.
Notre invité avait remarquablement respecté le cadre qu’on lui avait donné, c’est une chance. Nous avons joué le jeu jusqu’au bout, c’est révélateur.
Le fait d’être un peu déçu montrait avant tout une chose : nous n’étions ni traumatisés, ni offensés, ni trahis ou blessés par ce qui venait de se passer. J’ai toujours pensé de mon côté (et la suite de nos aventures le confirme je pense) que l’on s’en était fait une montagne pour pas grand chose. Pourtant c’est tout sauf “pas grand chose” , la seule explication était donc que nous n’avions pas besoin de devenir libertins, nous l’étions déjà.
Dans cet esprit, je ne pense pas non plus qu’il faille succomber au rapport physique pour savoir si l’on est attiré par les femmes, par les hommes ou les deux.
Cette première expérience était purement sexuelle, pas de conversation à peine une présentation, il ne fallait pas qu’elle le regarde et vice versa Elle s’était donc conditionnée et s’était offerte à lui, entière, nue, soutenue et rassurée par ma présence permanente à ses côtés.
Quelques heures après le départ de notre convive, nous avons fait l’amour de manière intense, amoureuse et passionnée et nous avons décidé de continuer notre exploration libertine, ensemble et à notre rythme.